Wednesday, November 15, 2017

Baisser les chiffres du chômage ? Facile !

(Article originalement publié en 2013 pour le Journal Toulousain dans la Chronique de Patrick Aubin. Republié ici car quelques cinq ans après, car il garde toute son actualité en matière économico-politique.)

Il était une fois un président normal répétant à l’envi qu’il allait faire reculer les chiffres du chômage avant la fin de l’année. Personne n’y croyait : nouvel adepte de la méthode Coué ? Tout le monde sûrement se trompait. Car un socialiste, surtout lorsqu’il est énarque, est capable de tout, c’est même sa spécialité. Manipuler les chiffres, c’est son fort. Etre honnête, c’est une autre histoire.

Bien sûr, le véritable objectif devrait être l’augmentation de l’offre d’emploi dans le secteur privé. Mais notez bien, l’engagement ne porte que sur « faire baisser les chiffres du chômage ». Donc ce sont les chiffres qui baisseront, pas le nombre de sans-emploi. Pour faire baisser les chiffres du chômage sur une courte durée, l’homme politique dispose de diverses astuces dans sa boite à outils.

La première consiste à laisser filer les fermetures d’entreprises avec bon espoir que cela se tasse. Et puis un coup de pouce et la tendance s’inversera. Au besoin, on prend des mesures administratives pour aider. A cet instant, cette première phase, avec les gesticulations de rigueur, se déroule comme prévu : les niveaux record sont dépassés de mois en mois et le rebond artificiel se rapproche.

Ensuite viennent les contrôles accrus sur les demandeurs d’emplois pour les rayer des listes. Bien sûr, ces chômeurs radiés réapparaîtront plus ou moins rapidement. Cette pratique, éphémère et trop visible pour être mise en œuvre à large échelle, trouve ses limites. Mais il n’y a pas de petit profit.

Vient alors l’idée d’occuper les demandeurs d’emploi comptabilisés dans les chiffres du chômage. Ils sortent ainsi des statistiques quelques mois sans pour autant retrouver un véritable emploi. Là, on est dans le bricolage : on aide temporairement dans le secteur public avec des boulots inutiles les non-qualifiés ou sans diplôme. L’atelier bricolage se termine en offrant, détournant ainsi l’argent de la formation professionnelle, une « formation » aux chômeurs, rendue inutile par une durée réduite.

Puis on comble l’écart de salaire qui existerait entre une offre d’emploi et celui, plus élevé, du marché de l’emploi hors chômage. Ainsi l’Etat, toujours très généreux avec l’argent des autres, aidera l’entreprise à compléter le salaire. Je vous laisse imaginer ce que cela peut entraîner : pour être augmenté, devenez chômeur ! Si si, le roi, pardon, le président des bricoleurs a évoqué cette piste.

Enfin, une astuce qui ne coûte rien, car elle se produit spontanément : ne rien faire pour retenir les jeunes qui partent à l’étranger. Ils paient peu d’impôts, et c’est surtout des chômeurs en moins.

Je ne développerai pas tous les effets pervers de ces mesures à moyen et long terme : on se doute bien que si cela fonctionnait, il y a belle lurette que le chômage ne serait plus. Peu importe, la boîte à outils du président-bricoleur sera utilisée à plein pour faire baisser les chiffres, mais que les chiffres. Donner un peu d’espoir vaut bien quelques tripatouillages sans lendemain. Belle ambition, non ?

Il n’y a qu’une chose qui devrait mériter attention : les conditions du développement économique. Or désormais en France, elles n’existent plus. L’utopie collective du social est privilégiée à la richesse du potentiel apporté par chacun. Nous voulons le beurre et l’argent du beurre sans faire l’effort de traire la vache. Ça ne peut qu’échouer. Grâce à notre argent, l’État s’est érigé en prestataire de services, mais il butte sur la réalité économique : il détruit toujours plus de valeur qu’il n’en crée...

Mais ce n’est pas grave, car les chiffres du chômage vont baisser ! Promesse sera tenue ! Attention, comme Perrette dans la fable, l’histoire se termine par adieu, veau, vache, cochon, couvée…

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