Thursday, January 28, 2016

Il y a comme un OS sous vérins

Ca y est, ça leur a repris. C’est comme des spasmes. Chaque année ou presque, chaque fois qu’il faut qu’ils occupent un sous-ministre obscur et sans compétence, il faut qu’ils affirment leur sottise, leur incompréhension du domaine, surtout leur besoin de nous garder sous contrôle avec une loi à contre-courant sur l’informatique ou l’Internet. Cette fois, on a droit (bel oxymore) à une « loi numérique », fourre-tout qui pousse un peu plus loin la vision chinoise que nos politiques ont du Net.

Avant de détailler un aspect qui me tient hacker, euh, à cœur, je voudrais attirer l’attention du lecteur sur une réalité qu’on oublie trop souvent de rappeler. Contrairement à ce que bien des juristes affirment et veulent instaurer, tel Alain Biensanssous, le domaine informatique et le Net en particulier ne peuvent PAS se voir appliqués les lois de la vie civile. Cela n’y a pas de sens.

Parce que c’est un domaine intangible, virtuel, sans réalité autre que les machines et câbles qui lui donnent vie. Pas de propriété au sens de notre droit, dans le Net. Dès lors, pas de responsabilité au sens du droit classique. Par conséquent, vouloir y imposer des lois ne peut avoir de sens que si ces lois prennent un autre fondement théorique dans cette nature virtuelle. Ainsi par exemple, vouloir parler de souveraineté d’Internet revient à chercher à faire ce que les Chinois on fait d’Internet chez eux – voire pire – à savoir isoler le réseau français du reste du monde, c’est-à-dire sortir d’Internet.

Donc un des sujets de la loi, sans doute sorti des cartons de quelques polis techniques de la même veine que ceux qui avaient annoncé dans les années 80 qu’Internet ne pourrait jamais permettre une activité professionnelle, un des sujets donc consiste à mettre au point un « système d’exploitation souverain ». C’est-à-dire qu’en bon Gaulois, on se lance dans un Windows meilleur que Windows, un Linux mieux que Linux ou que Unix, tout ça vous comprenez parce qu’on est les meilleurs et qu’en bons Français, on ne peut pas faire confiance aux Américains ou Chinois qui nous espionnent. Pffff.

Certes, le niveau atteint par les attaques en cyber(in)sécurité pose bien des questions. Le nombre de failles présentes ou inconnues dans les systèmes cités laisse songeur et rend souvent difficile la maîtrise raisonnable de la sécurité de certains systèmes informatiques critiques. Je dis souvent moi-même qu’il est économiquement scandaleux que Windows – ou autres – soit une telle passoire.

Mais si je ne fais pas confiance en Microsoft, pourquoi ferais-je confiance en un OS étatique ? Si Windows est opaque, pourquoi ne pas opter pour Linux qui a l’avantage d’être ouvert et modifiable à l’envi ? S’il y a un tel besoin d’un système, pourquoi ne pas laisser leur chance aux entrepreneurs qui sauront prendre le risque marché à leur compte sans que le contribuable finance ? Pourquoi avoir besoin d’une loi quelconque pour régler une question qui n’a rien a priori de régalien. A moins que ?

Oui bien sûr, à moins que…  A moins que l’objectif soit inavouable et bien de nature « régalienne », c’est-à-dire de nature à nous garder mieux sous contrôle. La loi est nécessaire parce que l’OS que les pires-aux-techniques vont nous créer sera bien en effet un machin souverain, en clair un moyen de surveiller tous ceux qui en feront usage. Si ce n’était pas le cas, pourquoi ce projet d’OS aurait-il besoin d’être sous vérins de subvention et contrôle étatique ? On critique la Chine. Et on fait pire.

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