Monday, February 10, 2014

Série Analyse des Programmes : Le FN : 7 à 12

« Se Libérer des marchés financiers
- Le monopole des banques sera supprimé en déprivatisant l’argent public. La Banque de France pourra ainsi prêter au Trésor public sans intérêts. En 40 ans, la France a versé 1¬400 milliards d’euros d’intérêts aux marchés financiers alors que nous avons 1¬700 milliards d’euros de dette.
- Le train de vie du Pouvoir sera f
ortement réduit : les dépenses somptuaires, indemnités excessives des élus et avantages injustifiés seront supprimés. De même, les subventions aux organismes et associations ne relevant pas de l’intérêt général seront remises en cause.
- Un plan d’action volontariste sera mis en oeuvre pour identifier et réduire drastiquement les dépenses inutiles et néfastes pour le pays : fraude sociale et fiscale, niches fiscales inefficaces (comme la niche dite « Copé » au bénéfice des grands groupes), coûts de la décentralisation, poids de l’immigration incontrôlée sur les budgets sociaux. »

Le FN confirme sa particularité, cette capacité à mettre le doigt sur de vraies questions sans pourtant y apporter de réponses vraiment compétentes.
On ne se libère pas des marchés financiers, leur rôle est essentiel dans l’économie, le problème n'est pas à ce niveau.
Supprimer le monopole des banques, bravo ! Mais « déprivatiser l’argent public », voilà un superbe oxymore qui oublie que l’argent ne devrait être à personne – surtout pas dans les mains de l’état. 
Prêter sans intérêt, voilà bien un fantasme étatiste et keynésien qui serait une catastrophe. Il est normal de payer des intérêts – les intérêts, c’est le prix de l’argent disponible quand on n’en a pas – et ne pas en payer conduit à la ruine des banques, à l’emprunt sans limite et à une monnaie qui finit par ne plus rien valoir, ruinant l’ensemble du peuple.
Une autre bonne idée pourtant, celle de réduire le train de vie du pouvoir, bravo bis ! Rien à dire, sauf que l’intérêt général n’existant pas (*), autant dire que toutes les subventions devraient être « remises en cause ».
Idem pour le plan volontariste, mais qui ne voit pas qu’il n’y a de dépense que « inutile et néfaste ». Alors, on fait le grand ménage ? Chiche !
(*) Ce n’est pas tout à fait vrai : l’intérêt général tient dans le respect de l’application identique du droit naturel à tous. »


« Revalorisation des pensions et prise en charge de la dépendance
- Le système de retraite par répartition sera pérennisé grâce à une politique réaliste et ambitieuse. Retrouver le plein emploi constitue la première exigence, ce qui suppose une rupture totale avec la politique de l’UMPS. La France doit se réarmer face à la mondialisation. Une grande politiq
ue nataliste sera préférée à une immigration coûteuse et déstabilisante. La solidarité entre les générations, qui est le socle de notre système de retraites, suppose des nouvelles générations nombreuses, qui feront demain la force de la France. […] »
Le titre n’est-il pas déjà digne d’un PS ? Fidèle à sa logique économique socialiste, le FN veut pérenniser un système qui est pourtant condamné par sa conception même. Politique « réaliste » ou « ambitieuse », rien ni fera.
Se « réarmer face à la mondialisation » n’est pas non plus la solution – on note au passage les termes guerriers, dénotant une vision agressive du commerce mondial, alors que rien n’est plus pacifique que le négoce libre.
La solution n’est pas non plus dans une jeunesse plus nombreuse : tout d’abord, cela ne se décrète pas et ensuite les jeunes viendront trop tard et pour poser à leur tour le même problème.
Non, la seule solution à la retraite, c’est la sortie de la répartition pour adopter la libre capitalisation individuelle.


« Retraites (suite)
Une cinquième branche du régime général de la Sécurité sociale dédiée à la dépendance sera créée, consistant à permettre la prise en charge collective de la dépendance, sans que le système ne repose sur des mécanismes assurantiels privés. Cette cinquième branche se verra confier la responsabilité de l’ensemble des moyens financiers et hu
mains actuellement mis en œuvre par les départements (allocation personnalisée d’autonomie) et les établissements de santé. Elle aura pour mission principale d’améliorer les conditions de prise en charge de la perte d’autonomie et de l’hébergement en établissement médico-social. Elle sera également en charge d’évaluer scientifiquement les besoins liés à la dépendance, afin d’adapter les politiques publiques et les modes de vie et d’organiser la formation à la gestion de la dépendance. À court terme, le reste à charge des personnes dépendantes sera diminué pour permettre à tous de vivre dans la dignité. Une analyse approfondie des besoins liés à la dépendance dans tous les domaines (santé et médecine, urbanisme, architecture, ergonomie, équipements, accès aux services publics, etc.) devra parallèlement être engagée pour être en mesure, à moyen terme, d’adapter les politiques aux évolutions démographiques. […] »
Nous sommes bien dans le socialisme le plus abouti avec le FN qui se confirme ici interventionniste comme jamais. A l’heure où il s’agit de simplifier les régimes et de les faire migrer sans exception vers la capitalisation, il ne trouve rien de mieux que créer un autre régime hors assurance privée. On se garde bien d’expliquer comment ce régime sera financé et on s’approprie des thèmes socialistes, au lieu de les dénoncer, tels les « besoins liés à la dépendance ». Ne nous y trompons pas : nous sommes tous dépendants. Tous nous avons besoin des services des autres pour simplement nous nourrir. Il n’y a rien de spécialement difficile à traiter de la « dépendance » car c’est le cœur même de la vie en société. Et la réponse à ce besoin est bien connue : il suffit de laisser faire le marché libre…


«Progressivité et justice fiscale
- La taxe d’habitation, opaque, sera intégrée à l’impôt sur le revenu, plus juste, sous la forme d’une taxe additionnelle qui sera aussi progressive que l’impôt sur les revenus.
- La priorité sera de rendre plus progressif, sans l’alourdir, l’impôt sur le revenu des personnes physiques par la création de nouvelles tranches
 intermédiaires. La tranche supérieure de l’Impôt sur le revenu sera portée à 46¬%. Ainsi, les classes moyennes paieront moins l’impôt sur le revenu, mais les foyers très aisés le paieront davantage. La fiscalité des dividendes sera revue pour que les revenus du capital ne soient pas favorisés par rapport aux revenus du travail. »
Déjà, le titre annonce la philosophie : la progressivité de l’impôt serait source de justice fiscale. Certainement pas. On nous a tant, depuis des générations, inculqué ce principe qu’on en oublie son injustice profonde. A supposé que l’impôt soit moral ou juste, la justice fiscale ne peut venir que de deux principes : soit tout le monde paie selon les services publics qu’il consomme, c’est la proposition libérale, soit dans le cas qui est hélas le nôtre, tout le monde paie la même somme. A la rigueur, certains « libéraux » pousseront la « flat-tax » c’est-à-dire un principe de proportionnalité appliqué aux revenus : tout le monde paierait disons 15% d’impôt. Supposer que la progressivité est juste, c’est supposer que les plus riches doivent être plus pénalisés et donc que leurs gains sont douteux. La dernière phrase de cette proposition est à ce titre lumineuse, elle montre bien que certains revenus dits du « capital » sont considérés comme malpropres, alors que le seul revenu malpropre et scandaleux, c’est celui issu de l’impôt lui-même.


« Progressivité et justice fiscale
- Un impôt progressif unique sur le patrimoine sera créé, fruit de la fusion entre la taxe foncière et l’Impôt sur la fortune (ISF), sur des bases rénovées assurant la justice fiscale. Cela permettra de supprimer la taxe foncière actuelle, fondée sur des bases injustes datant de 1970. L’ISF sera donc intégré à cet impôt u
nique et correspondra à une surtaxe respectant les mêmes taux qu’aujourd’hui.
- Les produits de première nécessité continueront à bénéficier du taux réduit de TVA à 5,5¬%. Mais la TVA peut être rendue plus progressive, de manière à dégager de nouvelles recettes et à répondre à l’objectif prioritaire de justice fiscale. Un taux de TVA majoré sera créé pour les produits de luxe (berlines, joaillerie et cosmétique de luxe entre autres exemples). »

Toujours le thème de la justice fiscale, nous ne reprendrons pas les arguments de notre note précédente – la fiscalité étant en soi injuste, il ne peut y avoir de justice fiscale.
Par contre, le FN supposé vaguement libéral confirme son socialisme en osant créer un nouvel impôt, et un impôt sur le patrimoine en plus, un autre terme pour critiquer le « kapital ». Un jour peut-être comprendrons-nous que ce n’est pas le capital ni le patrimoine qui est signe d’injustice, mais les privilèges…
Quant à l’autre mesure, elle prend le contre-pied en tombant dans le populisme idiot : quelqu’un peut-il SVP nous donner une définition ou caractérisation claire et objective de ce que sont des « produit de première nécessité » ou « produit de luxe » ? Est-ce qu’une pomme de terre de variété rare importée par avion est un produit de luxe et de première nécessité ? Une berline genre Lada est-elle un produit de luxe ? On aura compris le ridicule de telles approches…


« Fiscalité des entreprises
- Trois taux d’impôt sur les sociétés seront créés : 15¬%, 25¬% et 34¬%. Les taux les plus bas favoriseront les entrepreneurs individuels et les PME. Les recettes générées seraient réparties de la manière suivante : 2/3 pour le budget de l’État et 1/3 pour le budget des collectivités.
- S’agissant de la fiscalité des entreprises
, la fusion de l’IS et de la Contribution économique territoriale (CET) sera mise en oeuvre. En effet, la pression fiscale n’est plus contrôlée entre l’Impôt sur les sociétés (IS) prélevé par l’État et la CET qui finance les collectivités locales (et qui se décompose elle-même entre la Contribution foncière sur les entreprises et la cotisation sur la valeur ajoutée).
- L’amortissement des fonds de commerce sera déductible à l’acquisition et taxable à la cession sur plus-value.
- Les entrepreneurs individuels bénéficieront du même régime que les sociétés (trois taux progressifs d’impôt sur les sociétés). »

Une fois n’est pas coutume, le FN a l’avantage de proposer une véritable simplification de la fiscalité des entreprises. Mais là s’arrête le compliment, car sans aller même jusqu’à contester le principe même de la fiscalité, ces propositions sont loin d’être un progrès. Les taux proposés sont énormes : un quart ou un tiers de prélèvement confiscatoire, et on espère lutter face à l’Irlande qui pratique un 12,5% uniforme ? Pourquoi certaines entreprises devraient-elles payer plus d’impôts que d’autres ? Quels sont les critères ou seuils associés à ces taux ? On se garde bien de préciser cela dans un programme. Non, décidément, qu’on ne vienne pas nous dire que le FN est un moindre mal pour les libéraux.

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